Au lieu de me laisser décourager par la tournure du débat politique, j’ai décidé de pousser encore plus loin mon engagement politique en devenant le candidat du Parti Québécois dans la circonscription de Jean-Talon.
«J’ai un peu le vertige, c’est sûr… Normal, c’est une décision qui n’est pas banale.
— Mais pourquoi donc?
Parce que je pense qu’on n’accorde pas encore à l’éducation et à la culture toutes les ressources qu’elles méritent étant donné leur importance. (…)
Parce que je pense qu’il faut s’interroger sur l’étendue des rôles de l’État si on souhaite qu’il remplisse adéquatement ses fonctions les plus essentielles. (…)
Parce que je crois qu’il faut plus de gens avec des habiletés d’entrepreneurs au sein du gouvernement. (…)
Et parce qu’il faut bien le dire, j’ai franchement envie de relever ce défi!»
C’est Yves Bolduc qui était mon principal adversaire. J’ai tenté de dénoncer le fait qu’il avait continué à pratiquer intensivement la médecine en même temps qu’il était député — cumulant deux salaires, au détriment des citoyens de Jean-Talon — mais sans grand succès. Le sujet n’intéressait pas tellement les médias.
Pire, le Parti Québécois a fait, sur le plan national, une campagne extrêmement mauvaise… et perdu les élections. On allait avoir un gouvernement libéral majoritaire pour quatre ans.
J’étais évidemment déçu, mais je n’ai jamais regretté ma décision d’être candidat. La campagne électorale a été une expérience aussi extraordinaire qu’exigeante — à tous points de vue. On ne peut pas faire 35 jours de porte en porte sans s’en trouver profondément transformé. J’ai adoré l’expérience.
Le lendemain de la défaite, Mme Marois a démissionné de son poste de chef du Parti Québécois. J’ai aussitôt saisi l’occasion pour exprimer mes attentes à l’égard des aspirants-chefs:
«Il est encore plus essentiel de revenir à la base: pourquoi croyons-nous qu’il est indispensable de faire du Québec un pays? Je souhaite découvrir des propositions qui nous permettront de repartir des rêves et des aspirations des jeunes. Bâtir un nouvel argumentaire pour une révision en profondeur du statut politique du Québec. Pas seulement de nouvelles approches pour expliquer aux plus jeunes les raisons pour lesquelles nous, plus vieux, avons cru nécessaire de faire du Québec un pays. Ces raisons-là n’ont pas suffi et ne suffiront probablement pas la prochaine fois non plus, alors… Il faut repartir des aspirations des plus jeunes et (ré-)apprendre à expliquer pourquoi il sera plus facile de les réaliser dans un Québec-Pays que dans un Québec-Province.
J’ai aussi besoin d’entendre parler d’éducation et de culture. Beaucoup. Et souvent. Parce que c’est forcément au cœur de tout projet de société, et qu’on en parle trop peu, depuis trop longtemps.»
Plus important encore, je me suis interrogé sur la façon par laquelle un parti politique devrait se choisir un chef en 2014:
«Les débats auxquels un tel exercice doit donner lieu méritent mieux qu’une série d’événements super scénarisés où des hommes et des femmes debout derrière un pupitre prennent tour à tour la parole en évitant surtout de commettre des erreurs devant les caméras.
Si on croit que les habiletés essentielles pour être un bon leader aujourd’hui ne sont pas celles qui se manifestent dans ce type de mascarade.»
Sauf que, sans surprise, le Parti Québécois a choisi d’adopter un processus de course à la chefferie très traditionnel. J’allais néanmoins poursuivre la réflexion en 2016.
Peu de temps après, Yves Bolduc a été plongé dans une controverse quand on a appris qu’il avait (en plus du reste!) bénéficié d’une rémunération incitative pour prendre en charge ses patients pendant qu’il était député de l’opposition.
Ça m’a dégoûté, et je ne me suis pas privé pour le dire franchement:
«J’ai passé cinq semaines plus tôt ce printemps à dénoncer le fait qu’Yves Bolduc pratiquait la médecine à temps plein en plus d’être député à temps plein — et que ces deux emplois n’étaient pas conciliables.
J’ai dit presque tous les jours qu’il n’était pas possible de répondre aux exigences de son travail de député s’il pratiquait la médecine cinq jours par semaine. (…)
Ce n’est donc que cette semaine que tout a changé, subitement, parce qu’on apprenait que s’était ajoutée à ce double emploi une rémunération incitative exceptionnelle de plus de 200 000$. Le chiffre est gros, alors on s’y intéresse. (…)
Mais s’il s’était agi de seulement 100 000$? Est-ce que cela aurait été aussi choquant? En aurait-on parlé autant? Et 50 000$? Ou même 20 000$? À quel montant est-ce que les comportements d’un élu deviennent assez choquants pour qu’on s’en offusque?»
À l’automne, le ministre se retrouve à nouveau au cœur d’une controverse après avoir justifié une réduction des budgets des bibliothèques scolaires en disant «qu’il n’y a pas un enfant qui va mourir de ça».
Quelques semaines plus tard, j’ai décidé d’accorder mon appui à Pierre Karl Péladeau dans la course à la chefferie du Parti Québécois, notamment:
«[Pour que le Parti Québécois] cesse de s’abriter derrière le très commode “mystère Québec” et [qu’il consacre] enfin tous les efforts nécessaires pour regagner la confiance des citoyens de la Capitale-Nationale.»
J’ai terminé l’année en prononçant une conférence à l’occasion des 25 ans du Réseau interuniversitaire scientifiques du Québec (RISQ) — en faisant un retour sur 25 ans de changements technologiques et de développement d’Internet au Québec.
Une autre occasion de déplorer l’absence de plan numérique gouvernemental au Québec…